jeudi, juillet 3, 2025
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Santé Sexuelle et Reproductive : Des journalistes s’engagent contre la mortalité maternelle – RJ-DSSR Bénin

La santé sexuelle et reproductive en Afrique présente des défis importants. Ces problèmes sont exacerbés par le manque d’information et de sensibilisation, ainsi que par des lacunes dans les politiques et les législations. Au Bénin, les médias spécialisés réunis au sein du Réseau des Journalistes pour les Droits en Santé Sexuelle et Reproductive (RJ-DSSR) veulent impulser un changement de mentalité.

Tout individu a le droit à l’information complète sur les avantages, les inconvénients et l’efficacité des services de santé sexuelle et reproductive. C’est pourquoi le Réseau des Journalistes pour les Droits en Santé Sexuelle et Reproductive, avec à sa tête Olive Fleur OUSSOUGOE, a réuni début juin, les hommes des médias autour de la loi sur la santé sexuelle et de la reproduction. Selon la présidente du réseau, l’initiative va renforcer la compréhension des journalistes sur cette législation afin de leur permettre de mieux jouer leur rôle de sensibilisation.

Le Dr Raphaël Totognon du Collège National des Gynécologues Obstétriciens du Bénin va renchérir en expliquant que tout le monde doit veiller à la pleine jouissance de la santé sexuelle et de la reproduction.  « Aujourd’hui, nous devons pouvoir concilier les exigences de la culture et de la tradition avec les exigences du temps modernes. Tant il est vrai qu’il y a des choses à sauvegarder mais tant il est vrai qu’il y a des choses à reconsidérer, pas à remettre en cause », a-t-il indiqué.

En effet, la loi relative à la Santé Sexuelle et Reproductive au Bénin est la loi n° 2003-04 du 3 mars 2003, modifiée et complétée par la loi n° 2021-12 du 20 décembre 2021. Cette législation vise à garantir le droit à la santé sexuelle et reproductive de tous, y compris l’accès à l’information, aux services de santé, et à la planification familiale. Elle reconnaît le droit fondamental à la santé sexuelle et reproductive, qui englobe le bien-être physique, mental et social lié à la sexualité et à la reproduction. Aussi, cette législation établit l’égalité des sexes en matière de santé reproductive et promeut l’accès universel à ces services.

La loi sur la santé sexuelle et de la reproduction autorise l’IVG dans certaines conditions, notamment pour les femmes majeures, dans des structures de santé publiques ou privées agréées. Elle précise que la contraception d’urgence n’est pas considérée comme une IVG et que les médicaments utilisés à cette fin ne nécessitent pas d’ordonnance obligatoire.

Santé Sexuelle et Reproductive : Des journalistes s’engagent contre la mortalité maternelle - RJ-DSSR Bénin

Interview au Dr Raphaël Totognon du Collège National des Gynécologues Obstétriciens du Bénin

« Tout le monde est impliqué, responsabilisé pour une pleine jouissance aux droits sexuels et reproductives… »

Pourquoi la santé sexuelle et reproductrice est devenue une question cruciale aujourd’hui ?

Dr Raphaël TOTOGNON : La santé sexuelle et reproductrice est devenue une question préoccupante dans le monde entier aujourd’hui parce que le développement durable repose sur une meilleure santé sexuelle et reproductrice de tous les individus de la planète. Aujourd’hui nous sommes dans un monde globalisant ou ce que nous cherchons à cacher aux enfants ou à nos épouses, les gens peuvent y accéder grâce au ‘’Technologies de l’Information et de la Communication’’. Il n’est plus question de faire des sujets liés à la santé reproductrice une question ou un sujet tabou.

Qui responsabilisez-vous dans la société pour parvenir à un changement de mentalité ?

Tout le monde en général. Au Bénin, nous avons des instruments juridiques qui parlent de la question. Le premier instrument juridique qui en parle en dehors de la santé globalement, c’est un dispositif législatif : la loi 2003-04 du 3 mars 2003, relatifs à la santé sexuelle et à la reproduction en République du Bénin. C’est une loi qui définit en son article 10 les devoirs de responsabilités. Je peux essayer de paraphraser article 10 de cette loi : l’État, les communautés, les collectivités locales et les groupements communautaire, les personnes morales par le biais de leur représentant, doivent veiller à la sauvegarde, à la promotion et à la protection des droits sexuels et reproductrice de tout individu.

Tout le monde est impliqué et doit veiller à la pleine jouissance de ces droits.  Tant le gouvernement, les communautés locales et les personnes morales sont aujourd’hui les gardiens du temple. Dans notre famille on ne fait pas si, on ne fait pas ça… aujourd’hui, nous devons pouvoir concilier les exigences de la culture et de la tradition avec les exigences du temps modernes. Tant il est vrai qu’il y a des choses à sauvegarder mais tant il est vrai qu’il y a des choses à reconsidérer, pas à remettre en cause.

C’est pourquoi la loi depuis 2003 à donner une bonne place aux personnes morales par le biais de leur représentant. Tout le monde est impliqué, responsabilisé pour une pleine jouissance de chaque individu à ce droit sexuel et reproductrice, socle du développement durable.

La reconsidération dont vous parlez n’est-elle pas compliqué aujourd’hui ?

C’est un peu compliqué mais nous devons féliciter la volonté politique de notre pays. Notre pays s’est doté d’instruments juridiques qui normalement devrait permettre à chaque individu de jouir pleinement de ces droits sexuel et reproductrice. Il y a un adage courant qui dit que nul n’est censé ignorer la loi et nul n’est au-dessus de la loi. Est-ce que les gardiens du temple ont connaissance du dispositif législatif ou juridique qui existe et qui encadre la santé sexuelle et reproductrice dans notre pays ? Dans une large majorité on peut dire que non. Même des cadres à un certain niveau n’ont pas connaissance de ces instruments juridiques. Malheureusement c’est ça. Alors qu’on a dit que nul n’est censé ignorer la loi. Savez-vous que notre pays fait partie du conseil des nations et en tant que tel est tenu par des engagements internationaux, régionaux, africains et engagements nationaux ?

Au niveau des engagements internationaux, notre pays a participé à la conférence internationale sur la population et le développement de 1965 en Egypte il a participé à la conférence internationale sur la femme. Notre pays fait partie des Nations Unis donc doit prendre en compte la déclaration universelle des droits de l’homme. La question de la santé sexuelle et reproductive, lorsqu’on n’en jouit pas pleinement, c’est source d’handicap, c’est source de maladies pouvant aller jusqu’au décès. Aujourd’hui on comprend que le développement durable d’un pays passe forcément par le développement de la famille. Le développement de la famille repose surtout sur les femmes qui sont les chefs ménages. Alors si nous laissons les filles et les femmes continuées par mourir, qui sera le socle du développement durable dans nos états respectifs ?

L’UNFPA qui est l’agence des nations unies pour la population et le développement a dit que pour accélérer la réduction de la mortalité maternelle dans un pays, il faut agir sur trois résultats transformateurs dont : zéro besoin non ouvert en planification familiale et zéro violence basée sur le genre. Notre pays est ou par rapport à toi tout ça ?

Au niveau africain nous avons la charte africaine des droits de l’hommes et des peuples de l’Union africaine. A ce niveau, il y a le protocole de Maputo qui est un traité africain original qui proclame les 18 droits de la femme dans 32 articles. L’article 14 alinéa 1 du protocole de Maputo qui demande le droit de toute personne à jouir, à avoir des informations de qualité, des services de qualité sur les planifications familiales et l’article 14-2 qui demande aux états membres de l’Union africaine, de prendre des mesures spécifiques pour protéger les droits sexuels et reproductrices des femmes particulièrement en autorisant l’avortement médicalisé. Notre pays le Bénin a ratifié le protocole de Maputo. L’article 24 du protocole de Maputo demande aux Etats membres de l’Union africaine de prendre des mesures spécifiques pour protéger les femmes en situation de détresse. Le Bénin a ratifié le protocole de Maputo le 28 février 2005. Est-ce que nous pouvons ratifier le protocole de Maputo pour dire que les articles 14 et 24 ne nous concerne pas ? Non. Lorsque vous ratifier un protocole, ça veut dire que vous êtes d’accord non seulement à signer mais aussi à mettre en pratique dans votre pays.

Au niveau des engagements national, la constitution du Bénin que ce soit dans la loi du 11 décembre 1990 modifiée par la loi 2019-40 du 7 novembre 2019 n’a pas changé les articles que je veux citer. L’article 7 de la constitution de notre pays n’a pas été changé. Il dit que les droits et devoirs proclamés et garantis dans la charte africaine des droits de l’homme et des peuples l’Union africaine et ratifié par notre pays font partie intégrante de notre constitution. Si notre pays est allé sur une loi progressiste qui augmente les conditions d’accès des filles et femmes aux services d’avortement sécurisé, c’est lié à ses engagements au niveau international mais aussi au niveau africain. Avec la loi progressiste, la loi 2021-12 du 20 décembre 2021 qui a modifié et complété la loi 2003-04 du 3 mars 2003 on a l’article 17 qui autorise l’avortement à la demande de la femme en situation de détresse. C’est l’article 24 du protocole de Maputo qui demande aux Etats de soutenir les femmes en détresse à travers des mesures juridiques. L’article 8 de la constitution dit : la vie humaine est sacrée et inviolable. L’article 9 de la constitution poursuit :  l’État assure à chaque individu son développement et son plein épanouissement dans les dimensions matérielles, temporelles spirituelles et morale.

Aussi, les hommes pensent que si une femme doit demander un service lié à la santé reproductive et sexuelle, on doit demander l’heure permission parce qu’ils sont chefs de ménage alors que l’article 23 de la constitution nous parle d’égalité des sexes. Tellement il y a de disposition au niveau de la constitution, au niveau de nos engagements internationaux et régionaux qui doivent permettre à tout individu de ne plus s’opposer aujourd’hui à la jouissance des droits sexuels et reproductive de chaque individu.

La loi progressiste constitue-t-elle un cadrage systématique pour limiter les dégâts ou bien un appuie pour faire arrêter la saignée ?

Limiter les dégâts, oui ; mais aussi agir pour faire arrêter la saignée. Les résultats du 5e enquête de démographie et de santé du Bénin publiée en 2018 dit que l’avortement clandestin est la troisième cause qui tue les femmes au Bénin après l’éclampsie et les hémorragies. Ça veut dire que si nous voulons agir sur la mortalité dans notre pays il faut agir sur les trois premières causes. Les gouvernements successifs ont agi sur les hémorragies et l’éclampsie en renforçant le plateau technique des hôpitaux, en renforçant les capacités des acteurs et personnels de santé à prévenir et à prendre en charge ces deux pathologies. Mais par rapport à la 3e cause qui est l’avortement clandestin, en dehors de la loi 2003-04 qui en sont article 17 parle d’interruptions volontaire de la grossesse pour une première fois, seulement dans les conditions où la grossesse est la conséquence d’un viol, d’un inceste, lorsque la poursuite de la grossesse peut engager la vie de la femme ou bien lorsqu’il s’agit d’une grossesse avec fœtus mal formé.

Malheureusement avec cette loi qu’est-ce qui se passe ? Lorsque les jeunes filles et les femmes vont à l’hôpital avec une grossesse non désirée et demande de l’aide on leur dit ‘’la seule loi qui existe dans notre pays ne nous permet pas de vous accompagner parce que vous connaissez celui qui vous a enceinté, ce n’est pas un viol, ce n’est pas votre parent qui vous a enceinté, vous êtes en bonne santé et votre fœtus n’est pas mal formé’’. Mais la femme dit je ne peux pas garder. Du coup elles font recours systématiquement à l’avortement clandestin porteur de complications et de conséquences qui peut aller des hémorragies jusqu’au décès.

Et que diriez-vous aux familles ?

Les familles doivent pouvoir promouvoir le dialogue parents enfants, enlever les tabous sur les questions de la sexualité. L’éducation sexuelle doit commencer depuis la maison avant de venir même à l’école. Si nous renforçons la confiance de nos enfants et que nous les éduquons proprement à une sexualité responsable, en leur expliquant comment leur organisme va changer au fil du temps, les différentes types de morphologies, l’apparition des poils sur le pubis, dans les aisselles, la voix qui va changer, les premières règles chez la femme,… lorsqu’on les éduque suffisamment à la maison par rapport au développement de leurs organes reproductrices, ils auront forcément confiance aux parents et se confiront à eux afin de bénéficier de leurs conseils pour ne pas aller à la sexualité précoce source de complications que nous craignons.

Réalisé par Félicienne HOUESSOU

Avez-vous des informations à transmettre aux journalistes d’Africa3i ? Envoyez-nous un e-mail à africa3info@gmail.com

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