La pression sur les compagnies minières s’accentue au Mali. Le gouvernement a saisi l’or produit par Barrick Gold sur le site Loulo-Gounkoto et mène la vie dure aux autres compagnies minières.
Le site Loulo-Gounkoto et la firme canadienne subit de plein fouet le bras de fer entre la junte militaire et les compagnies minières occidentales. Le deuxième producteur d’or au monde, le canadien Barrick Gold, a annoncé que les autorités militaires, qui ont pris le pouvoir en 2020, ont commencé à saisir l’or disponible sur le site pour le transférer vers une banque dépositaire. Le samedi 11 janvier dernier, deux hélicoptères de l’armée de l’air se sont posés aux abords de la mine de Loulo-Gounkoto avec une vingtaine de militaires armés. Ces derniers ont saisi trois tonnes d’or sur ordre de la justice malienne, en litige fiscal avec la société canadienne Barrick Gold, qui exploite le site depuis 2018.
En effet, au cours de l’année 2022, les autorités maliennes ont réalisé un audit complet de toutes les concessions minières, et font depuis pression sur les compagnies pour renégocier les contrats et imposer le nouveau code minier. Selon le gouvernement malien, Barrick Gold doit payer des arriérés de taxes et appliquer la nouvelle version du code minier. La compagnie estime pour sa part que l’audit est biaisé et en conséquence ne concerne nullement les activités de Barrick dans le pays.
Loulo-Gounkoto, une mine vitale pour l’économie malienne
Loulo-Gounkoto est l’une des plus grandes mines d’or au monde. En 2023, elle représentait un tiers des exportations officielles d’or malien et a généré 433 millions de dollars de revenus pour le gouvernement, qui en détient 20 % et Barrick 80 %. Au cours de cette année, la mine de Loulo-Gounkoto a produit 19 tonnes d’or, soit près d’un tiers de la production totale du Mali, évaluée à 65 tonnes.
Les recettes liées à l’or contribuent pour un quart au budget national et le métal jaune représente trois quarts des exportations. Pour Barrick Gold, seule la mine de Carlin dans le Nevada (Etats-Unis) produit des volumes supérieurs et génère plus de cash que le site malien. Depuis fin octobre, moment où la junte militaire commence à chercher à reprendre le contrôle du métal précieux dans son sous-sol en visant Barrick, le cours de Bourse de la société canadienne a perdu plus de 20 %, alors que les cours de l’or sont restés stables sur cette période.
En dehors de Barrick, le PDG de Resolute Mining et deux autres dirigeants ont été placés en garde à vue à l’issue d’une réunion à Bamako et ils ont été entendus par le pôle spécialisé dans la lutte contre la corruption et la délinquance économique et financière. D’autres sociétés, comme B2Gold Corp, ont conclu des accords avec le gouvernement, acceptant de payer des redevances plus élevées et de faire d’importantes contributions financières. Seul Barrick oppose une résistance aux exigences de la junte.
Le régime militaire malienne adopte en effet, une position similaire au Niger, où les autorités militaires ont récemment pris le contrôle des opérations d’extraction d’uranium de la société française Orano. La junte s’est engagée à renégocier les accords miniers au profit de ses citoyens. Et pour cause, elle affirme que les entreprises étrangères n’ont pas suffisamment contribué au développement du Mali.
Félicienne HOUESSOU
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