En marge de la 57e session de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), des décideurs politiques, des chefs d’entreprise et des partenaires au développement se sont réunis pour discuter de la manière dont les entreprises africaines peuvent réussir à commercer dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) tout en favorisant une croissance inclusive et un travail décent.
Organisé par la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (Bureau sous-régional de la CEA pour l’Afrique australe, Centre africain pour les politiques commerciales et Bureau sous-régional pour l’Afrique du Nord) et l’Organisation internationale du Travail (OIT), l’événement a souligné à la fois le potentiel de transformation de la ZLECA et le besoin urgent d’agir pour garantir que les entreprises, en particulier les micro, petites et moyennes entreprises (MPME), puissent en récolter les fruits.
Ouvrant la séance, Eunice G. Kamwendo, directrice du bureau sous-régional de la CEA pour l’Afrique australe, a souligné que la ZLECA ne se limite pas aux transactions, mais concerne aussi les personnes. Elle a insisté sur le fait que les MPME, qui représentent 90 % des entreprises et 80 % des emplois, doivent disposer des outils nécessaires pour réussir, car elles sont des moteurs essentiels de la transformation économique en Afrique.
De son côté, Melaku Desta, coordinateur du Centre de coopération technique africaine (ATPC) à la CEA, a présenté le Guide étape par étape pour le commerce des marchandises dans le cadre de la ZLECA, un outil pratique destiné à aider les entreprises à s’y retrouver dans les procédures commerciales et à accéder aux opportunités de marché. Il a souligné que, si des stratégies nationales de mise en œuvre de la ZLECA ont été élaborées, elles restent largement axées sur le secteur public, ce qui laisse aux MPME un soutien direct limité.
Teddy Soobramanien, PDG du Conseil des entreprises du COMESA, a souligné l’urgence d’aller au-delà des discussions politiques et a exhorté le secteur privé à « transformer la ZLECA en action ». Il a appelé les entreprises à exploiter activement l’accord pour développer le commerce régional et ainsi exploiter pleinement le potentiel de la ZLECA.
Abordant la question des droits du travail, Hod Anyigba, directeur exécutif de l’Institut africain de recherche et d’éducation sur le travail (ALREI) et économiste en chef de la Confédération syndicale internationale (CSI)-Afrique, a souligné que « le commerce doit servir les personnes, et pas seulement les profits ». Il a appelé à un renforcement des protections du travail, à la responsabilisation des entreprises et à une diligence raisonnable dans la mise en œuvre de la ZLECA, avertissant que sans ces garanties, la libéralisation du commerce pourrait conduire à l’emploi informel et à la détérioration des conditions de travail.
Marva Corley-Coulibaly, Cheffe du Département Mondialisation, Compétitivité et Normes du Travail à l’OIT, a souligné que la création d’emplois de qualité ne se fait pas automatiquement. « Tout comme nous planifions méticuleusement les politiques commerciales, industrielles et d’investissement, nous devons également prévoir le travail décent, et non pas une simple réflexion après coup », a-t-elle déclaré. Si la ZLECA comporte des dispositions relatives au travail, elle a souligné que des lacunes importantes subsistent, notamment en ce qui concerne la lutte contre l’esclavage moderne, la traite des êtres humains et la sécurité au travail. Elle a proposé l’introduction d’un protocole sur le commerce et le développement durable afin de garantir que le commerce se traduise par un travail décent et la justice économique.
Abordant le rôle des femmes et des jeunes entrepreneurs, Cynthia E. Gnassingbe, conseillère principale auprès du Secrétariat de la ZLECA, a souligné l’importance d’un accès élargi aux marchés, d’une réduction des barrières commerciales et d’un soutien institutionnel. Elle a souligné que le Protocole sur les femmes et les jeunes dans le commerce et le Protocole sur le commerce numérique offrent un cadre pour une participation inclusive, mais nécessitent des mécanismes de financement plus solides pour garantir aux MPME un accès à des capitaux abordables. Elle a également appelé à la mise en place de programmes de renforcement des capacités offrant des formations commerciales, du mentorat et des opportunités de réseautage pour autonomiser les entrepreneurs.
Les experts ont souligné les actions clés pour maximiser l’impact de la ZLECA :
Promouvoir le commerce équitable et le travail décent en renforçant les protections du travail, en garantissant leur application et en faisant progresser l’inclusion sociale.
Aligner les politiques nationales pour une mise en œuvre complète de la ZLECA.
Soutenir les MPME, les femmes et les jeunes avec du financement et de la formation.
Améliorer la facilitation des échanges grâce à des réglementations et des outils clairs.
Impliquer le secteur privé pour transformer les politiques en actions.
La Boîte à outils pour le travail décent de l’OIT, qui facilite l’examen des dispositions relatives au travail dans les accords commerciaux et l’impact des politiques commerciales sur les marchés du travail, ainsi que le Guide étape par étape pour le commerce des marchandises dans le cadre de la ZLECA de la CEA, constituent des outils précieux pour soutenir le commerce du secteur privé tout en promouvant le travail décent. La session a souligné la nécessité d’une collaboration pour garantir que la ZLECA stimule la transformation économique des entreprises et des travailleurs en Afrique.